Cap des 3 ans de relation : le comprendre et le surmonter

Le cap des 3 ans de relation est un jalon déterminant dans la vie d’un couple. « Un moustique dure une journée, une rose trois jours. Un chat dure treize ans, l’amour trois. C’est comme ça. Il y a d’abord une année de passion, puis une année de tendresse et enfin une année d’ennui. » écrit Frédéric Beigbeder dans son roman L’amour dure trois ans. Il est vrai que la relation de couple est très souvent remise en question entre la 3^ème et la 5^èmeannée après son début. Pourquoi cette crise survient à ce moment de la relation ? Comment l’expliquer ? Comment y faire face ? Et surtout est-ce la fin de l’amour ? Ou bien est-il possible de réinventer son couple et de faire durer l’amour ?

La lune de miel ou les débuts souvent euphoriques de la relation

Les débuts d’une relation amoureuse sont souvent euphoriques. Notre esprit, notre cœur et notre corps sont mobilisés. Nous nous sentons bien, heureux, épanouis. Tout est source de joie. Même le monde environnant semble participer à la fête.

Dans cette première phase de la relation, nous avons la volonté de tout partager. Nous multiplions les activités à deux et sommes toujours contents de nous voir. D’ailleurs, lorsque l’autre est absent, il nous manque ! Nous cherchons à en savoir toujours plus sur l’autre et à vivre dans une grande intimité.

A ce stade de la vie d’un couple, il n’y a pas de questionnement : nous avons enfin trouvé la Princesse Charmante ou le Prince Charmant ! Si quelque chose crispe, gêne ou embarrasse, nous l’occultons. Dans le même temps, nous cherchons à nous montrer sous notre meilleur jour. Chacun se comporte en effet comme si l’autre était un « invité spécial ».

Durant cette lune de miel, nous avons finalement une image idyllique de nous, de l’autre et de notre relation.

Après la lune de miel, la phase de lutte de pouvoir marque le cap des 3 ans de relation

Après les premières années de lune de miel, les couples se retrouvent souvent confrontés à une période où la déception, la critique et l’ennui surviennent. Cette étape qui suit la phase fusionnelle se caractérise par une pensée centrale : le problème vient de l’autre.

Chacun a parfaitement identifié et analysé les défauts de l’autre et se focalise dessus. Qu’il le fasse exprès ou non, qu’il subisse l’influence de sa mère ou qu’il ait des problèmes personnels, en tout état de cause, les difficultés dans notre couple viennent de lui. D’ailleurs, nous sommes persuadés que si notre partenaire changeait, tout irait mieux.

En définitive, dans cette phase de la relation, chacun veut que l’autre se conforme à ses attentes et lui accorde l’amour tel qu’il le souhaite. L’enjeu est alors de faire changer l’autre. C’est pourquoi les thérapeutes de couple nomment cette étape « la lutte de pouvoir ». Il s’agit en effet d’imposer ses vues à l’autre et de le faire changer.

La lutte de pouvoir entraîne des pensées et réactions de défense

Dans cette étape de lutte de pouvoir, lorsque nous n’arrivons pas à imposer nos vues à notre partenaire, nous réagissons en développant des attitudes de non-communication. Nous pouvons bouder ou critiquer sans cesse notre partenaire.

Notre regard vis-à-vis de notre partenaire peut aussi se figer. Nous développons des aprioris négatifs et mettons notre partenaire dans une case : il est comme cela, elle ne changera jamais, etc. Nous lui reprochons sans cesse des choses qu’il a pu faire, ou bien au contraire ne pas faire. Un oubli, un silence, une maladresse… nous interprétons de façon négative toutes ces situations, en considérant systématiquement que notre partenaire est mal attentionné.

Enfin et surtout, nous pouvons considérer que si notre partenaire ne change pas malgré nos demandes, c’est qu’il manque de volonté, et donc d’amour. Nous nous sentons alors blessés. Pourtant ne pas changer complètement pour devenir ce que l’autre attend de nous n’est pas un manque d’amour.

Le cap des 3 ans peut conduire à déserter la relation

Après trois à cinq ans de relation, lorsque la période romantique prend fin et que les reproches et les critiques se multiplient, la relation nous apparaît comme une source de frustration ou de mal-être. Nous pouvons alors avoir tendance à fuir la relation pour nous sentir moins exposés. De façon plus ou moins consciente, nous désertons le « Nous » en nous consacrant à d’autres activités : soins des enfants, réseaux sociaux, soirées entre amis, investissement professionnel, activité sportive, engagement associatif…

Sortir de la lutte de pouvoir et passer le cap des 3 ans de relation

Comment alors sortir de cette phase de lutte de pouvoir ? Voici trois points clés :

Sortir de la vision idéalisée de la fusion du couple pour trouver un juste équilibre entre fusion et indépendance.
Accepter l’autre tel qu’il est vraiment.
Se mettre en action pour son couple.

1. Pour passer le cap des 3 ans, sortir de la vision idéalisée de la fusion du couple

La fusion, vision idéalisée de la vie de couple

L’idéal de la plupart des couples nouvellement formés est de partager un maximum d’activités, de passer le plus de temps possible ensemble, de prendre ses vacances ensemble, de sortir ensemble et bien sûr de dormir ensemble. Cette vision fusionnelle du couple est prédominante et valorisée dans notre culture. C’est le modèle que l’on retrouve dans les romans et les films romantiques. Dans l’imaginaire collectif, cet état fusionnel est la marque de la réussite d’un couple. Dans cette logique, on associe, à tort, le besoin de plus d’indépendance à une diminution de l’amour.

La vie de couple, un équilibre entre inspiration et expiration

Dans une relation de couple, maintenir une fusion constante dans la durée est difficilement viable. Il y a un sérieux risque d’étouffement. Les thérapeutes de couple Carolle et Serge Vidal-Graf voient la vie de couple comme une respiration qui alterne l’inspiration et l’expiration :

Les moments d’inspiration correspondent aux périodes de partage, de fusion.
Les moments d’expiration surviennent lorsque chacun se retrouve seul, sans l’autre, afin de consacrer du temps à soi, à des activités personnelles, ou à des rencontres individuelles avec des amis.

On ne peut inspirer en permanence, ni expirer en permanence. Il ne s’agit donc pas de choisir entre l’un ou l’autre, mais bien d’accepter une alternance entre les deux.

Le cap des 3 ans de relation doit permettre de trouver un équilibre entre fusion et indépendance

Le besoin d’indépendance varie considérablement d’une personne à l’autre. Certains ressentent le besoin de beaucoup de temps pour eux-mêmes en-dehors du couple, d’autres beaucoup moins. Certains peuvent simplement avoir besoin de se retirer dans un espace personnel sans quitter la maison, d’autres ont besoin de plus d’espace.

De même, le besoin de partager des moments en couple est différent pour chaque personne. Certains vont accorder beaucoup d’importance aux temps passés ensemble, d’autres vont accorder plus d’importance à d’autres langages d’amour.

Le psychiatre Serge Hefez note que culturellement, les hommes et les femmes n’ont pas la même conception de la proximité dans le couple et n’attendent pas la même chose de la relation. Cependant, il n’existe pas de norme en la matière. Chacun a son propre niveau d’attente, sachant que dans un couple, il est fréquent que l’un des partenaires recherche davantage le rapprochement alors que l’autre souhaite plus d’indépendance. Ainsi, c’est à chaque couple de trouver l’équilibre qui lui convient entre les moments de fusion et ceux d’indépendance.

2. Accepter l’autre tel qu’il est

La désillusion met fin à la vie de couple rêvée

La période idyllique, passionnée et fusionnelle du couple peut durer jusqu’à trois à cinq ans. Elle prend fin avec une dé-idéalisation de l’autre. Le psychologue Yvon Dallaire le décrit bien : « Un jour ou l’autre, nous finissons par trouver notre partenaire moins charmant qu’au début, moins intelligent, moins sexy, moins cultivé, moins sociable… Les petits défauts minimisés du début, les petites différences que nous avions occultées prennent de plus en plus d’importance avec le temps qui passe. C’est alors que l’on se rend compte que l’autre ne partage pas tout à fait nos points de vue sur les loisirs, l’argent, le choix de la maison, la répartition des tâches ménagères, le nombre et l’éducation des enfants, les amis, la fréquence des rapports sexuels, le type et l’endroit de nos vacances, le choix des films… »

En réalité, notre partenaire n’a pas changé, mais nous le percevons différemment. De ce fait, nous percevons aussi différemment notre couple.

Renoncer au désir de changer son partenaire de couple

Accepter l’autre tel qu’il est réellement constitue donc une étape critique dans l’évolution de tout couple. En dépit des éventuelles déceptions, il importe d’accepter notre partenaire tel qu’il est. Nous acceptons ses imperfections, conscient que nous aussi, nous sommes loin d’être parfaits. Notre admiration continue à nourrir les fondements de notre relation amoureuse.

La période de lutte de pouvoir prend fin lorsque nous renonçons au désir que l’autre devienne ce que nous souhaitons. Nous apprenons à nous « contenter », non pas dans un sens de résignation, mais dans celui de trouver le bonheur et la satisfaction dans ce que notre partenaire nous offre.

3. Se mettre en action pour le bien-être de sa relation de couple

Mettre les sujets sur le tapis

Toute relation de couple repose sur un pacte, c’est-à-dire sur un accord implicite et réciproque pour ne pas parler de ce qui fâche chez l’autre. La première crise de couple est une remise en question de ce pacte, souvent par l’un des deux partenaires car il est rare que les deux partenaires le remettent simultanément en question. En modifiant le contrat implicite et en autorisant chacun à évoluer, la crise des 3 ans de relation est finalement une opportunité de faire avancer son couple.

Pour cela, un réel échange dans le couple est nécessaire. Garder le silence est en effet souvent une voie de résignation.

Passer de l’attente à l’intention

« Si tu m’aimais, tu ferais … pour moi ». Un danger dans la relation de couple est de se mettre en position de « client » vis-à-vis de notre partenaire qui serait « fournisseur ». Non seulement nous attendons tout de notre partenaire, mais il doit de surcroît deviner et anticiper nos attentes. Être dans l’intention, c’est prendre conscience de la coresponsabilité de la relation, c’est choisir de vivre d’une certaine manière avec son partenaire, c’est se mettre en action pour que cela advienne.

Être à l’initiative du changement dans la relation

Pour passer le cap des 3 ans et sortir de la lutte de pouvoir, il est important d’adopter deux attitudes :

Garder à l’esprit que chacun a sa propre manière de fonctionner. Il est inutile de s’épuiser à offrir à notre partenaire toutes les formes d’affection que nous souhaiterions recevoir nous-mêmes, sachant que ses envies, ses désirs et ses besoins peuvent être totalement différents des nôtres.
Se concentrer sur ce que nous pourrions changer de notre côté en se demandant ce que notre partenaire aimerait voir évoluer en nous. En effet, la thérapeute de couple Caroline Kruse le rappelle : « Le couple est un système et toute modification d’un élément amène chez l’autre la nécessité d’un réajustement. »

Cesser de remettre l’amour en question

Pour sortir de la lutte de pouvoir et passer le cap des 3 ans de relation, il est enfin nécessaire d’accepter l’évolution du lien amoureux. Nous passons de l’état passif « d’être amoureux » au verbe d’action « aimer ». Cela nécessite un engagement vis-à-vis de notre partenaire. Yvon Dallaire le constate : « Les partenaires heureux ont décidé d’être avec l’autre et présent pour l’autre, jour après jour. Ils ont cessé de remettre leur amour en question à chaque différend : chaque nouvelle crise renforce leur lien, car au lieu de se demander s’ils vont se séparer ou non, ils mettent leur énergie à résoudre la nouvelle crise avec leur partenaire. »

La crise des 3 ans de relation, une étape inévitable qui peut être positive

La phase de lutte de pouvoir est inévitable dans un couple. Tous les couples y sont confrontés !

Cette phase de lutte de pouvoir peut conduire à un affrontement stérile où chacun veut imposer ses vues à l’autre et sa propre conception du « Nous ». En revanche, si elle est envisagée de façon positive, elle permet de découvrir qui est réellement la personne dont nous sommes amoureux. Elle peut aussi clarifier ce que chacun attend du « Nous ». Enfin elle offre la possibilité de trouver un équilibre entre fusion et indépendance.

En prenant conscience des enjeux, il est ainsi possible de surmonter le cap des 3 ans de relation et de renforcer son couple.

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