La proximité dans le couple génère un risque de blessures émotionnelles
Dans un couple, du fait de la proximité sentimentale des deux partenaires, il est fréquent que surviennent des blessures émotionnelles. Une parole, un geste ou une attitude de l’un des partenaires peut ainsi créer une souffrance chez l’autre. Parfois, cela est totalement involontaire de la part de celui qui a provoqué la blessure. D’autres fois, il s’agit d’un simple manque de tact. Cela peut être encore lors d’une dispute lorsque « les mots vont plus loin que la pensée ».
Pour celui qui ressent la blessure émotionnelle, il s’agit souvent d’une peine superficielle et passagère. On pourrait la qualifier d’ « irritation sentimentale ». Mais parfois elle est beaucoup plus intense. Elle provoque alors chez celui qui la ressent un réel déséquilibre émotionnel. Le risque est alors que cela entraîne le couple dans des schémas nocifs d’interaction.
Il est important de prendre conscience que lorsque cette peine est intense, c’est que très souvent la parole, le geste ou l’attitude a touché une zone d’hypersensibilité émotionnelle. C’est comme s’il s’agissait d’allergies. Pour la plupart des gens, humer le pollen du printemps, manger des cacahuètes ou se faire piquer par une abeille ne provoque aucun symptôme ou simplement un désagrément temporaire. Pour d’autres personnes, cela provoque des réactions intenses et incontrôlées. Il en est de même pour les zones d’hypersensibilité émotionnelle. Une même parole ou un même gestes qui n’aurait provoqué aucune réaction chez certains, pour d’autres personnes, cela va les conduire pour à ressentir une vive souffrance.
Identifier les zones de vulnérabilité aux blessures émotionnelles dans son couple
Ces zones d’hypersensibilité qui provoquent des sur-réactions sont généralement issues de notre histoire passée. Elles se sont développées dans notre enfance mais aussi dans nos relations sentimentales antérieures. Selon la psychologue et thérapeute de couple anglaise Sue Johnson, les zones d’hypersensibilité se forment lorsqu’un « besoin d’attachement a été négligé, ignoré, écarté à plusieurs reprises, laissant la personne émotionnellement dépossédée et désertée ». Elles peuvent aussi survenir dans la relation actuelle lorsqu’on a ressenti un grand besoin de réconfort de l’autre mais que ce réconfort n’a pas été obtenu. Cela peut par exemple être à l’occasion d’un événement malheureux comme la perte d’un proche ou un licenciement, moment pendant lequel nous n’avons pas ressenti le soutien de notre partenaire.
La plupart d’entre nous ne connaissons pas précisément nos zones de d’hypersensibilité. Nous en percevons les conséquences tel que l’irritation, la colère, la volonté de repli sur soi… Mais nous n’en avons pas une réelle conscience ni une compréhension de leurs origines. L’enjeu est alors de les identifier, aussi bien en soi que chez son partenaire. Pour cela, deux signaux permettent de les repérer :
- Lorsque ces zones de d’hypersensibilité sont activées, il y a un changement radical et soudain dans la tonalité émotionnelle de la relation. L’un des partenaires est contrarié ou furieux, ou au contraire distant et froid.
- La réaction de celui qui est blessé est clairement disproportionnée par rapport à sa cause.
Le lien d’attachement à l’origine des blessures émotionnelles
Chacun peut avoir plusieurs zones de d’hypersensibilité. Selon le thérapeute de couple américain Stan Tatkin, chacun de nous en a trois au quatre. Ce sont des points de vulnérabilité que nous garderons toute notre vie. Il s’agit par exemple d’une peur de perdre le contrôle, d’être enfermé dans une relation, d’être abandonné par son partenaire, d’être réprimandé, d’être dans une trop grande intimité, d’être en dépendance émotionnelle, ou encore d’être une gêne pour les autres…
Ces zones de d’hypersensibilité sont activées par une peur concernant nos liens d’attachement affectif. « Pour bien comprendre le mécanisme de ces zones sensibles, il nous faut regarder de plus près les émotions enfouies responsables de cette extrême sensibilité et réussir à les inventorier de façon à pouvoir mieux les gérer » écrit Sue Johnson dans le livre Serre-moi fort ! Elle décrit le mécanisme qui se met en route :
- Un lien d’attachement nous semble menacé, ce qui déclenche immédiatement une alarme intérieure pour nous prévenir du danger.
- Notre corps réagit en premier. Nous ressentons des frissons, des douleurs au ventre… Notre voix devient plus aiguë, nous rougissons, notre corps s’échauffe… Ce sont nos émotions qui prennent le dessus et transparaissent par le biais de notre corps.
- Notre intellectuel s’enclenche ensuite. Des pensées pessimistes et néfastes nous gagnent.
- Enfin nous agissons, en cherchant à se rapprocher de l’autre, en se battant ou au contraire en cherchant à fuir et à s’isoler de notre partenaire. Parfois nous restons prostrés. Les sentiments de colère, de honte, de peur ou de tristesse nous submergent.
Identifier les risques de blessures émotionnelles pour permettre une relation de couple apaisée
Faire ce travail d’identification des zones de d’hypersensibilité dans son couple représente un certain défi.
Tout d’abord, il faut oser regarder en face ses propres zones de vulnérabilité. Il est évident que nous sommes peu enclins à nous attarder sur nos faiblesses. Généralement, nous préférons les occulter, notamment du fait du message ambiant de notre société qui nous impose d’être fort. Pourtant, c’est une étape clef pour parvenir à guérir de ses points de vulnérabilité.
La deuxième difficulté est d’oser nous confier à notre partenaire. Notre premier réflexe est de nous protéger, pas de nous ouvrir à l’autre. « L’amour vraie nécessite du courage – et de la confiance » nous dit Sue Johnson pour nous encourager. C’est en effet la voie pour guérir de nos blessures profondes mais également pour créer une connexion solide dans notre couple. Pour cette étape, il est souvent préférable de s’ouvrir progressivement à son partenaire, en avançant pas à pas.
Enfin, il s’agit d’entendre et d’accepter avec empathie les vulnérabilités de notre partenaire s’il les exprime. Parfois notre partenaire n’a pas conscience ou ne souhaite pas s’ouvrir sur ses zones d’hypersensibilité. C’est alors à nous de devenir « expert de l’autre ». Par un travail expérimental, en observant attentivement ses réactions, nous pouvons les déceler. Cela nous permet alors d’éviter de le blesser, mais également de connaître ce qui l’apaise. Par exemple à un partenaire qui a peur d’une trop grande intimité, il peut est bon de lui rappeler que la liberté de chacun est préservée dans le couple.
Connaître précisément les zones de sensibilité de son partenaire et savoir ce qui permet de les soulager est selon Stan Tatkin un « superpouvoir secret » dans une relation de couple harmonieuse.